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Elections
Colombie, jeu de miroirs à droite
Si les législatives de dimanche octroient une majorité au président Santos, la principale opposition au dialogue avec la guérilla vient de son camp, avec l’élection d’Uribe au Sénat.
Cathy Ceïbe / jeudi 13 mars 2014
 

Sur le papier, la victoire est incontestable. L’alliance électorale du président de droite, Juan Manuel Santos, a remporté, dimanche, les élections législatives, les premières depuis le début des pourparlers, il y a un an et demi, avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie. Le Parti de la U, le Parti libéral, et Cambio radical s’offrent 47 sièges sur les 102 du Sénat. Au sein de la Chambre des représentants, si le Parti libéral arrive en tête (39 élus), la U, la formation du président, le talonne de peu (37 parlementaires), suivie du Parti conservateur, troisième force politique dans les deux chambres. La droite domine donc, ce qui en soi n’a rien d’inédit en Colombie. Mais, et c’est là l’un des enseignements de ces scrutins, l’ancien président ultradroitier Alvaro Uribe s’impose au Sénat comme la seconde force politique avec le centre démocratique Main ferme Cœur grand.

Durant ses mandats (2002-2010), il avait appliqué avec obsession sa stratégie dite de sécurité démocratique qui s’était traduite par une militarisation sans précédent du pays. Ces périodes avaient également été entachées par des scandales à répétition, dont celui de la parapolitique impliquant plus d’une centaine de parlementaires de la majorité pour leurs liens avec les paramilitaires d’extrême droite.

Depuis le début du dialogue avec la guérilla, le président Juan Manuel Santos, qui fut le parfait élève d’Uribe en tant que ministre de la Défense, a pour principal opposant son prédécesseur. Signe du poids des va-t-en-guerre, les représentants du gouvernement et de l’insurrection aux négociations à La Havane ainsi que les journalistes qui couvrent l’événement ont fait l’objet d’écoutes illégales de la part de l’armée. L’uribisme n’a donc rien perdu de ses réseaux d’influence, ni de sa capacité de nuisance.

Ce face-à-face droite-droite est d’autant plus inquiétant que la gauche est à la traîne et divisée. C’est le deuxième enseignement de ces scrutins. Le pôle démocratique alternatif, avec cinq sénateurs et trois députés, ferait presque oublier qu’il fut, en 2006, la seconde force politique du pays. De divisions en exclusions, il a perdu de sa crédibilité. Quant à l’Union patriotique, son récent retour sur la scène politique après le massacre en règle de ses militants et dirigeants, lui offrait peu de chance de pouvoir rivaliser dans les urnes. Enfin, troisième facteur inquiétant, si ces élections n’ont pas été le théâtre de fortes violences, elles restent néanmoins marquées par l’achat de votes et une abstention de plus de 60 % qui en disent long sur l’exaspération populaire.