Échange de prisonniers proposé en Colombie

par LQML
13 septembre 2004

Le 18 août dernier le président colombien Alvaro Uribe a proposé une version gouvernementale pour l'échange de prisonniers de guerre après avoir refusé d'agir sur la question depuis son arrivée au pouvoir en 2002. Le conflit armé entre l'État colombien est soutenu par les États-Unis et l'oligarchie au pouvoir, et d'autre part par l'insurrection populaire du peuple colombien qui lutte pour la justice sociale et le progrès, la démocratie et l'indépendance depuis plus de 40 ans. Le conflit doit son existence et sa longévité au fait que la politique de violence des cercles dirigeants et la criminalisation de la résistance du peuple l'a obligé à poursuivre sa lutte par tous les moyens nécessaires, dont l'insurrection armée. Un aspect principal de la résistance est le refus par plusieurs Colombiens d'abandonner leurs justes aspirations en devenant passif ou en s'exilant; d'attendre passivement d'être tués par les agents officiels ou officieux de l'État et de l'oligarchie au pouvoir, malgré l'horrible violence à laquelle ils font face.

Durant ce conflit, l'État colombien a fait des milliers de prisonniers, entre autres parmi le mouvement de guérilla, les condamnant en tant que criminels de droit commun au lieu de les reconnaître comme prisonniers politiques et prisonniers de guerre. En même temps, les membres de la guérilla ont détenu plusieurs centaines de soldats capturés au combat, quelques membres de l'élite politique ainsi que trois mercenaires américains selon les normes attribuées aux prisonniers de guerre. Quelques échanges limités de prisonniers ont eu lieu voilà plusieurs années et les forces de l'insurrection ont aussi libéré unilatéralement des prisonniers.

À cause de la souffrance des prisonniers détenus des deux côtés et pour certains depuis de longues années, le besoin d'un mouvement d'échange organisé de prisonniers et l'établissement d'un mécanisme pour le faire, aussi longtemps que durera le conflit, est devenu une demande criante. Cette demande faite par le peuple colombien n'est surpassée que par le désir d'une paix durable et définitive. Les forces de l'insurrection présentent cet échange comme étant une priorité immédiate, par respect pour leurs propres camarades, pour le bien- être de leurs prisonniers, pour les familles et les amis impliqués des deux côtés et sur le principe d'humaniser le conflit en cours.

Mais au contraire, l'État qui est soutenu par l'intervention américaine grandissante sous le couvert du «Plan Colombie», est toujours animé par l'objectif d'éliminer l'insurrection populaire en utilisant une solution militaire. Quant aux prisonniers, les dirigeants de l'État comptent manifestement détenir ceux qu'ils appellent les criminels de droit commun ou des «terroristes», tout en se souciant fort peu de la longue détention de ceux qu'ils ont envoyés en guerre contre leur propre peuple ainsi que de ceux qui y ont trouvé la mort dans des opérations militaires ou de sauvetage.

La récente proposition d'Uribe a été rejetée comme étant de mauvaise foi et non-sérieuse car elle n'est aucunement basée sur un dialogue avec les forces d'insurrection et a été amenée de façon unilatérale. Il y a des mois, les Forces armées révolutionnaires de Colombie - l'Armée du peuple (FARC-EP) ont nommé leurs trois négociateurs et demandé des garanties pour eux, afin que les pourparlers pour les échanges puissent commencer. Le gouvernement n'a jamais nommé son représentant ou répondu d'une quelqu'autre manière. L'allégation du gouvernement d'Uribe comme quoi des contacts secrets ont eu lieu est probablement un mensonge selon les FARC-EP, qui affirment: «Nous nions catégoriquement toute proposition officielle en provenance du palais présidentiel antérieure au 18 août.»

Poursuivant: «Qu'il vaut la peine de se souvenir d'un accord résultant d'un face à face où les deux parties ont exprimés leur volonté commune».

Loin de présenter des mesures d'ensemble, la proposition d'Uribe limite l'échange de prisonniers à 50, alors que plus de 3 000 prisonniers des FARC- EP sont détenus par eux et définit des restrictions concernant les «crimes» qui seront exclus des échanges stipulant aussi que le nombre de prisonniers que le gouvernement compte relâcher sera inférieur à dix. De leur côté les forces de l'insurrection réclament l'échange de tous ceux qu'ils détiennent contre tous les prisonniers de la guérilla que détient le gouvernement. «La proposition officielle d'échange manque de sérieux et de réalisme car elle nie au mouvement de guérilla le droit de dire qui et combien sont les prisonniers? Elle nie toute discussion sur les conditions et circonstances de la libération des forces d'insurrection armées contre l'état et l'établissement des relations entre certains crimes et le droit à la dissidence armée. Où est l'échange quand le gouvernement poursuit sa guérilla»?

Plutôt qu'un effort honnête pour résoudre un problème urgent la proposition d'Uribe révèle la crise grandissante du régime. «Son voeu pieu était que dans 18 mois il aurait écrasé l'insurrection; un rêve basé sur une intervention américaine massive et sur l'utilisation d'armement de haute-technologie, etc.. Les 18 mois sont devenu 24 et loin de voir la lumière au bout du tunnel, ses troupes et ses bandes de para militaires sont de plus en plus démoralisées. Comme le souligne un rapport d'état concernant une vaste opération dans le sud de la Colombie: «Un soldat professionnel blessé dans une embuscade de la guérilla à San Juan de Losada et maintenant retraité a confessé que la majorité des soldats de son unité veulent retourner à la maison. Il y a une forte pression du haut commandement mais les résultats ne se concrétisent pas. C'est comme si nous combattions contre un ennemi invisible» a-t-il dit.

Par conséquent, la proposition d'Uribe se présente comme une tentative détournée et maladroite pour répondre à la pression de trouver une solution pour l'échange puisque dorénavant la question ne peut plus être complètement ignoré et dépeindre l'insurrection comme un obstacle. Les calculs d'Uribe ont encore échoué. Le communiqué des (FARC- EP) conclut: «Nous avons désigné nos négociateurs plénipotentiaires depuis déjà plusieurs mois. Quelles garanties le gouvernement nous a-t-il fournies pour eux? Quelles garanties a-t-il prévues pour les prisonniers si nous arrivons à un accord? Qui va négocier au nom du gouvernement? Nos représentants sont prêts.»

Par conséquent, la proposition d'Uribe se présente comme une tentative tortueuse et maladroite de répondre à la pression d'un réel échange puisque dorénavant la question ne peut plus être complètement ignoré.

 
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